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La vie c'est un peu comme un sandwich...
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  • On a beau faire, on a beau dire, la vie est une suite de piles de bonheurs et de malheurs comme des tranches de pancetta ou de cornichons dans un sandwich : c'est plus ou moins heureux, doux, acide ou rebutant...
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10 avril 2011

KING KONG, M. C. Cooper, 1933

jack_et_ann« Anne : Ca n’a pas l’air de vous plaire une femme sur un bateau !

Jack : Non, trop encombrant.

Anne : Je tâcherai de ne pas l’être.

Jack : L’ennui, c’est que c’est déjà fait. » 



   Cet échange, repris et mis en abyme dans le King Kong de Peter Jackson (2005), scelle le destin de ces deux personnages embarqués presque malgré eux dans une aventure dramatique qui trouvera sa catharsis dans la mort du roi Kong. Tout le monde connaît l’histoire du roi Kong mais en regardant à nouveau la version de 1933 je lui trouvais à la fois de bonnes raisons d’en rire et à la fois un charme curieux.

 

 

 

    Jurrasic Park Aventure (parcours vert)

diplodocus   Ainsi, le scénario connaît quelques écueils (ou c’est le script qui n’a pas fait son boulot). Un marin amoureux d’une belle actrice poursuit celui qui l’a enlevée au cœur d’une forêt préhistorique et peu lui importe qu’il fût un gorille géant ; un gorille géant enlève une jeune femme à la blondeur enivrante et peu importe qu’il dévore tous les autres sauf elle ; des hommes poussent à l’aide de bâtons un radeau sur un lac d’où sort une créature préhistorique d’une trentaine de mètres ; un diplodocus (herbivore) avale un pauvre marin accroché à un arbre.

   Et puis, il y a les effets spéciaux qui participent plus ici d’un moment historique que d’un absolu indépassé, et la beauté plastique des décors (qui brûleront d’ailleurs dans l’incendie d’Atlanta dans le film de V. Fleming, Autant en emporte le vent, 1939) où la ville rivalise de faste et de grandeur avec la jungle de l’île.

    Et si la dramaturgie se déroule, crescendo, de l’enlèvement d’Anne vers la cime de la forêt de l’île jusqu’à la chute de Kong du plus haut des buildings new-yorkais sans qu’on soit véritablement surpris, King Kong de M.C. Cooper vaut le coup d’œil pour ce qu’il dit sur la société américaine et sur le cinéma.

 

ann_muette   Une poupée russe (poilue)

    King Kong est une poupée russe qui continue de fasciner. Des récits emboîtés (ce réalisateur illuminé à la poursuite d’un film unique, ce marin Jack à la poursuite de la femme aimée, cette actrice à la poursuite d’un succès à venir), un drame romantique (ils l’aiment, il n’en restera qu’un), un film dans le film (un réalisateur qui cherche à réaliser un film unique) et un hommage au cinéma muet (l’étonnante scène sur le pont du bateau où Ann joue l’effroi est un des climax du film), rien moins que cela !

 

 

   « Yes we can » aurait dit Homère

   Kong est un de ces monstres qui peuplent les récits mythologiques des sociétés plus anciennes et le film inscrit ce triomphe dans une série de mythes que les Américains s’ingénient à construire film après film. Jack est un nouvel Ulysse, malin et courageux, arrachant la belle à la bête ; les avions qui terrassent le grand singe fendent les airs comme des dieux modernes invoqués pour venir en aide aux humains dépassés. Les Américains sont en même temps ces dieux et ces héros. L’Amérique peut tout et surtout rassurer des citoyens qui auront survécu à la crise de 1929.

    L’espèce humaine (en fait, les Américains) triomphe, à la fin, de la sauvagerie primitive incarnée par Kong qui justifie sa mise à mort marquant la supériorité de la modernité de leur civilisation. Kong est le passé chutant du haut de ce mastaba éclatant qu’est l’Empire State Building. Le film pourrait être une parabole moderne de la supériorité des descendants du Mayflower sur leur ancêtres européens.

 


   "Nous avons trouvé quelque chose de mieux que tous les films du monde"

ann_et_jack_fin   Et ce mieux là, c'est cette nature primitive, originelle et fantasmée d'un monde disparu et redécouvert par cet arrogant réalisateur américain, persuadé de tenir là un mythe en devenir qui fera de lui un homme riche – et de l’Amérique, une nation de conquérants. Mais le mythe de la belle et la bête qui achève le film ("C'est la belle qu'a tué la bête." finit par conclure le réalisateur devant le cadavre du Kong déchu) boucle tragiquement ce fantasme et en même temps la fin du film.

   Finalement, ce qui est mieux que tous les films du monde, n’est pas Kong s’agitant dans la ville mais ce qu’il en reste : le film de Cooper. Une spectatrice s’insurge même à la fin dans le théâtre lorsqu’on lui dit qu’elle verra le singe plutôt que le film sur le singe. Le cinéma, c’est la réalité c’est-à-dire l’Amérique triomphante.

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