Les tas
C'est un constat imparable : on a tous des tas à ranger. Des tas dont on doit se débarrasser qui encombrent les combles de nos circonvolutions cérébrales ou nos cours et nos caves débordantes et craquantes. A chacun ses tas de casseroles qu'on traîne, homme de peine aux tâches vaines que nous sommes. Les tas s'entassent, c'est leur vie, ça et là et s'immiscent lâches dans les nôtres, entachent la sérénité de nos nuits et nos après-midi. Il y a toujours des tas de trucs à faire, des tas de gens à voir, des tas de têtes à farcir, des tas d'heures à rattraper, des tas de travaux à réaliser, des tas de copies à corriger, des tas de bois à ranger, des tas de biberons à laver, des tas de plinthes à fixer, des tas de films à voir, des tas de livres à lire, des tas de photos à trier, des tas de linge à laver et plier, des tas de... des tas de... Mais il devrait y avoir des tas de bonnes raisons de ne rien faire si ce n'est d'attendre paisiblement que les minutes et les heures s'égrainent et que l'absence soit une priorité pour retrouver l'indispensable enfoui dans le flot de ces tas : l'autre - sa présence, sa vie, ses joies, ses douleurs - que l'impéritie à ne pas s'affranchir de ces tas m'empêche d'aimer comme on aime un frère, un père, un ami ou celui que je ne connais pas encore.